REUTERS/Stephen Lam
C’est ce qu’estime le ministre israélien de la Sécurité intérieure. Il accuse Facebook de ne pas modérer suffisamment les contenus, et Mark Zuckerberg d’avoir du sang sur les mains. Pour de plus en plus de personnes,Facebook est un complice. De quoi? Ca dépend.
Il suffit de taper « Facebook accusé… » dans Google, et de voir toutes les propositions d’auto-complétion qui s’affichent, pour se rendre compte que le réseau social n’aurait pas assez d’une vie pour purger sa peine s’il était condamné pour l’ensemble des faits reprochés. Les accusations vont parfois très loin. Samedi, le ministre de la Sécurité Intérieure israélien, Gilad Erdan, a estimé lors d’une interview à la chaîne israélienne Arutz 2 que Mark Zuckerberg avait sur les mains « une partie du sang » de l’adolescente américaine assassinée à Kiryat Arba en Cisjordanie le 30 juin.
« Facebook sabote le travail de la police israélienne »
« Facebook sabote le travail de la police israélienne, parce que quand la police les contacte, et que c’est en relation avec un habitant de Cisjordanie, Facebook ne coopère pas », a affirmé le ministre. « Depuis l’essor de Daech et la vague de terreur, Facebook est devenu tout simplement un monstre », a-t-il ajouté, demandant aux citoyens israéliens d’inonder le fondateur du réseau social de courriers lui réclamant de mieux surveiller les contenus publiés sur sa plateforme.
Il lui reproche un seuil de tolérance bien trop élevé en ce qui concerne les contenus incitant à la haine. L’assassin de la jeune fille avait annoncé sur Facebook son soutien aux attaques visant des Israéliens et son souhait de mourir en « martyr ».
Facebook a réagi dans la journée, par une déclaration en hébreu. « Il n’y a pas de place sur notre plateforme pour les contenus qui encouragent la violence, les menaces directes, le terrorisme ou la violence verbale. Nous avons un guide pour aider les gens à comprendre ce qui est permis sur Facebook, et nous appelons les gens à faire usage de nos outils de reporting s’ils tombent sur des contenus qu’ils estiment en porte-à-faux avec ces directives, afin que nous puissions évaluer chaque incident et prendre des mesures rapides », a déclaré Facebook, selon la traduction de i24 News.
Déjà accusé de « soutien » aux terroristes par une famille
C’est la deuxième fois en quelques semaines que Facebook est accusé de faire le jeu du terrorisme. Mi-juin, le père d’une victime américaine de l’attentat du Bataclan a porté plainte contre Facebook, Google et Twitter, les accusant d’avoir fourni un « soutien matériel » aux terroristes, et d’avoir permis, « en connaissance de cause », au groupe Etat islamique de recruter, collecter de l’argent et diffuser sa propagande.
Facebook apparaît régulièrement dans les enquêtes liées à des attentats terroristes. Salah Abdeslam, le seul survivant du commando des attentats de Paris en novembre 2015, s’était affiché peu de temps avant sur le réseau social avec un drapeau de Daech. Larossi Abballa, l’assassin du couple de policiers à Magnanville, a revendiqué son crime en direct sur Facebook. La plateforme est largement utilisée dans le recrutement de « soldats » et de prosélytes, et symbolise la « radicalisation sur internet« .
De plus en plus difficile de « jouer au Suisse »
Peut-on pour autant la tenir responsable de tout ce qui circule sur le réseau? L’Union des étudiants juifs de France (UEJF) et SOS Racisme soutiennent en tout cas que Facebook ne modère pas assez efficacement les incitations à la haine, et ont exprimé en mai leurvolonté d’assigner le site en référé « pour comprendre les raisons du non respect de leurs obligations légales ».
Les détracteurs de Facebook sont d’autant plus irrités que le réseau social a montré qu’il savait être très efficace en matière de censure, quand il s’agit d’images pornographiques ou simplement de seins nus. Evidemment, un sein est un sein alors qu’une parole doit toujours s’apprécier en vertu du droit applicable, de l’intention, du respect de la liberté d’expression, etc. C’est plus délicat.
Néanmoins, sa capacité de censure quand il le veut bien n’est pas le seul motif qui pousse certains à vouloir faire prendre ses responsabilités à Facebook. Son pouvoir d’influence politique naissant fait également l’objet de plus en plus d’attention.
On a pu le voir dans le cadre du vote sur la sortie de l’UE au Royaume-Uni: Facebook proposait un statut « en faveur du Brexit », mais pour trouver le statut automatique votant le maintien dans l’UE, il fallait farfouiller beaucoup plus longtemps dans les menus. Facebooka donc été accusé d’être pro-Brexit.
On l’a également vu, toujours dans le domaine politique, pendant lesprimaires américaines. Par l’intermédiaire de sa fonctionnalité « tendances », disponible aux Etats-Unis et qui correspond à peu près aux « Tendances » sur Twitter (sauf que les sujets sont gérés par des « curateurs » qui sélectionnent les thèmes et les liens qu’ils estiment pertinents), la plateforme a été accusée de censurer les contenus trop conservateurs, notamment ceux un peu trop proches de Donald Trump.
Il va clairement devenir difficile pour Facebook de continuer à défendre sa position de neutralité. C’est la rançon de sa puissance médiatique.