Sidiki Kaba, ministre de la justice et président de la conférence des Etats parties de la Cour pénale Internationale se désole de cette superstition qui a amené, « certainement », les Présidents Senghor, Diouf et Wade à se garder de construire des prisons. Peut-être, ont-ils voulu se garder de finir comme Mamadou Dia qui a été incarcéré dans une geôle qu’il a, lui-même, construite. Conséquence immédiate d’une telle attitude : « les prisons existantes sont vétustes ». L’invité du Grand Jury de ce dimanche signale que « Ni Senghor, ni Diouf, ni Wade n’ont construit de prison. La première prison construite au Sénégal date de 1863, soit 153 ans. La deuxième est celle de Bambey et elle est centenaire. Rebeuss, quant à elle, est de 1929 », par conséquent vieille de 87 ans. Au total, explique le garde des Sceaux, notre pays compte seulement 37 prisons. Ce déficit est dû à plusieurs facteurs dont la réticence affichée par la coopération internationale à collaborer dans ce sens, et une superstition bien visible chez les gouvernants et chez les populations.
Le Président Macky Sall, précise-t-il, ne versera pas dans cette niaiserie. « A Sébikotane, nous avons une première prison de 500 places que nous sommes en train de construire et qui sera achevée en Janvier. 70 % des travaux sont réalisés. Il y a une autre de 1500 places toujours à Sébikotane et nous attendions de vendre Rebeuss qui est évalué à 7 milliards. Il faut qu’on trouve un acquéreur ». Autrement dit, le désengorgement des prisons est inscrit dans les priorités de son ministère.
DES PRISONNIERS ARMÉS ET MUNIS DE PUCES ET DE TÉLÉPHONE
Interpellé sur la minuterie de Rebeuss, Me Sidki Kaba, après avoir présenté les condoléances à la famille d’Ibrahima Fall, le détenu mort lors des échauffourées, a signalé avoir demandé une enquête à la direction des Investigations Criminelles. Il se réjouit malgré tout, du « professionnalisme » des 44 gardes pénitentiaires qui ont réussi à éviter un carnage face aux 2073 prisonniers qui s’agitaient. « Dakar serait en danger si ces derniers étaient parvenus à sortir. Nos forces de sécurité sont des professionnels… » Toutefois s’étonne-t-il de savoir que les détenus étaient munis « d’armes, de pierres, de puces et de téléphone », avant de poser la question « comment ont-ils eu tout ça ? ».
Par rapport à cette surpopulation notée dans les prisons, Sidiki Kaba reconnait la réalité du scandale, surtout pour Rebeuss. « Cette prison, dit-il, c’était pour 600 prisonniers. Les murs ne sont pas extensibles. C’est une ancienne fabrique transformée en prison. 9 319 prisonniers ». Il invite aussi à prendre en compte la criminalisation de la drogue qui a contribué à remplir les geôles. Ainsi, va-t-on vers la réforme de la Loi Latif Guèye, et celle du code pénal avec la mise en place de chambres criminelles permanentes. Pour ce qui est de la légalisation du cannabis, le ministre n’agrée pas la proposition. Le ministre d’inscrire dans la grande réforme de la justice Sénégalaise, la construction de prisons à Thiès, Mbacké, Tamba… de centres médico-sociaux, d’infrastructures, écoles pour la formation des magistrats, d’avocats etc…
VIP ET LIBERTÉS PROVISOIRES FINALEMENT DÉFINITIVES ?
« Justice de riche et une justice de pauvre »… Pour Sidiki Kaba, cette phrase galvaudée ne repose sur rien de concret. Il rappelle que les Vip dont on parle, (une dizaine en moyenne ayant bénéficié de liberté provisoire), seront jugées non sans rappeler que 8 291 personnes ont bénéficié d’une grâce présidentielle. A ce propos, il fustigera « les généralisations abusives » avant d’affirmer que « les procès sont en cours. L’année à venir, ces personnes qu’on ne nomme pas seront jugées. Les noms que vous ne citez pas (parlant au journaliste qui finira par citer le nom de Cheikh Béthio et de Thione Seck), seront jugés. Que ce soient des guides religieux, des hommes qui sont très connus, leurs dossiers sont en cours. Le temps médiatique n’est pas celui de la justice ». Avant de fermer ce chapitre, le ministre, précisera que le guide spirituel des Thiantacônes sera lui aussi jugé cette année. « Son procès aura lieu. La rentrée des cours et tribunaux, c’est le 15 janvier ».
MENACES CONTRE LES DIFFUSEURS DE FAUSSES INFORMATIONS
Loin, dit-il, de prendre le contre pied du Premier ministre qui a ouvertement menacé les diffuseurs de fausses nouvelles, Me Sidiki Kaba s’est voulu républicain, même s’il estime que certains opposants en font trop. « Il ne m’arrivera jamais de menacer quelqu’un. Ce n’est ni mon rôle ni mon pouvoir. Je n’en ai ni le droit, ni le pouvoir et la loi ne me le donne pas. Ce que la loi prévoit, c’est que celui qui dit ce qu’il ne doit pas dire, il peut être poursuivi. L’opinion fait partie de la démocratie. La démocratie, son ennemi mortel, c’est l’apathie. Dans une démocratie majeure, les acteurs qui aspirent à prendre le pouvoir sont des acteurs qui éclairent et qui donnent des opinions qui sont documentés. Alors quand on est dans ce registre, on fait avancer le débat. L’Etat ne dira pas à des gens que nous vous empêchons de parler. Si tel était le cas, les débats que nous avons dans les radios, les télévisions où le chef de l’Etat est continuellement vilipendé comme si c’est un sport national, n’aurait pas lieu… ». le ministre de la justice rappelle que la justice veille au grain pour que personne n’outrepasse la loi.
KARIM WADE
Pour Sidiki Kaba dire qu’il est interdit à Karim Wade de revenir au Sénégal relève de suspicions. Et à la question de savoir s’il peut revenir, il a lancé sans hésiter : « Absolument ! »