Reuters le 30/10/2016 à 19:11
(Actualisé avec violences)
par Joe Bavier et Loucoumane Coulibaly
ABIDJAN, 30 octobre (Reuters) – Le référendum sur la
nouvelle Constitution présentée par le président Alassane
Ouattara a été marqué dimanche par des violences dans une
centaine de bureaux de vote en Côte d’Ivoire.
Bien qu’aucun chiffre officiel n’ait été fourni la
participation semblait assez basse, bien en dessous des 54,5%
enregistrés lors de la présidentielle l’an passé, notamment à
Abidjan, la capitale économique du pays, alors que l’opposition
a appelé à un boycott du scrutin.
Les opposants d’Alassane Ouattara estiment que les
modifications voulues par le chef de l’Etat ont pour but de
renforcer la coalition qui le soutient. Le président affirme que
ces ajustements permettront de consolider la paix après des
années d’instabilité politique.
Le ministre de l’Intérieur Hamed Bakayoko a annoncé que la
sécurité avait été renforcée dans certaines régions du pays
après des violences commises dans une centaine de bureaux de
vote à Abidjan et dans l’ouest du pays.
« Nous pensons qu’il y a un groupe, vraiment bien organisé,
qui passe de région en région et dont la mission est de
perturber le scrutin autant que possible », a-t-il dit.
Un scrutateur dans le quartier de Yopougnon à Abidjan a
raconté qu’il se préparait à ouvrir son bureau de vote
lorsqu’est arrivé un groupe de jeunes, dont certains armés de
bâtons et de machettes.
« Ils nous ont demandé d’arrêter de travailler parce que la
nouvelle Constitution n’était pas faite pour le peuple. Ils ont
cassé les urnes et éparpillé les bulletins de vote. Ils ont tout
détruit », a ajouté le scrutateur.
SUPPRESSION DE L' »IVOIRITÉ »
Le texte supprime notamment la clause d' »ivoirité », soit
l’obligation faite aux candidats à la présidence de la
République d’avoir des parents nés ivoiriens.
Cette clause est depuis longtemps source de tensions en Côte
d’Ivoire, pays à forte immigration étrangère. Elle a surtout été
brandie par les adversaires de l’actuel chef de l’Etat pour
l’empêcher de se présenter à la présidentielle.
Alassane Ouattara avait promis l’an dernier lors de la
campagne en vue de sa réélection qu’il ferait abolir cette
clause, afin de tourner la page sur plus d’une décennie de
violences politiques qui ont tourné à la guerre civile en
2002-2003 puis en 2010-2011, quand le président sortant, Laurent
Gbagbo, contestait la victoire de son rival au scrutin de
novembre 2010.
Réélu il y a un an, Ouattara présente son projet, approuvé
il y a un peu moins de trois semaines par l’Assemblée nationale,
comme une garantie pour l’approfondissement de la paix et de la
stabilité politique en Côte d’Ivoire.
La réforme fixe en outre de nouvelles normes pour une
révision de la Constitution, qui n’exigerait plus la tenue d’un
référendum mais un simple vote des Parlementaires à la majorité
qualifiée des deux tiers. Des groupes de défense des droits de
l’homme y voient un risque potentiel.
De même, des organisations de la société civile et des
diplomates ont critiqué le processus constituant, regrettant une
absence de transparence dans l’élaboration du texte et un
calendrier trop serré: depuis son approbation par les députés,
les électeurs n’ont eu qu’une vingtaine de jours pour se faire
un avis sur ses 184 articles.
Le « oui » devrait l’emporter, jugent des analystes, qui
ajoutent que le chiffre de la participation sera également
Malgré cinq ans de paix et de relance de l’économie, les
Ivoiriens restent profondément divisés sur des lignes de faille
politiques et ethniques. La constitution actuelle a été rédigée
à la suite du coup d’Etat militaire mené en 1999 par le général
Robert Guéï.
(Eric Faye et Henri-Pierre André pour le service français)