Le PDG de Facebook dresse le bilan de dix ans d’activité. Il change également les perspectives de Facebook pour les années à venir.
Dans un très long message posté sur Facebook, Mark Zuckerberg affiche ses ambitions pour l’avenir du réseau social. Sobrement titrée «Construire une communauté globale», la publication s’adresse à près de deux milliards de membres, après une année polluée par les débats autour des fausses informations. Comme il en a l’habitude, Zuckerberg use de poncifs en insistant sur sa volonté de «rendre le monde meilleur». Mais pour une fois, il prend ses responsabilités, reconnaît ses erreurs et distille quelques informations cruciales sur l’avenir de Facebook.
Davantage de points de vue
L’Américain aborde deux points très discutés, à savoir les bulles d’information et les articles mensongers. Après avoir insisté sur la porosité des frontières entre l’opinion, la satire et le mensonge, il affirme vouloir diversifier les sources d’information proposées aux membres. Dans la lignée de ce qu’il avait évoqué il y a quelques semaines, il souligne la nécessité d’apporter d’autres points de vue – en y intégrant un travail de vérification des faits, sans pour autant pratiquer la censure.
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Zuckerberg concentre aussi ses attaques sur le sensationnalisme, accusant les articles aux titres trompeurs qui viennent polluer notre fil d’actualité. Là encore, le sujet avait déjà été évoqué. Mais on apprend que les équipes de Facebook ne se contentent pas d’analyser les titres pour faire disparaître les articles concernés. Elles étudient également les habitudes des utilisateurs en vérifiant que ces derniers lisent les articles qu’ils partagent et partagent les articles qu’ils lisent. Autant de données qui permettent de savoir si le titre reflète avec justesse le contenu.
Une politique à la carte
En septembre, Facebook était accusé de censure pour avoir supprimé une célèbre photo de la guerre du Vietnam, sous prétexte qu’elle mettait en scène une fillette nue. Dans sa lettre, Zuckerberg reconnaît ses erreurs. Il affirme même être souvent du côté de ceux qui s’opposent à cette censure, mais être confronté à des «problèmes d’échelle». Dans un élan de franchise, il reconnaît que Facebook a pu – à tort – «supprimer des comptes et des contenus qui auraient dû rester en ligne et maintenir des contenus haineux qui auraient dû être effacés».
Pour remédier à ce problème, Mark Zuckerberg fait une annonce concrète: à l’avenir, chaque utilisateur pourra adapter son profil selon sa sensibilité à la nudité, à la violence – dans le cas de contenus ayant un intérêt public ou historique – ou aux contenus explicites. Même par défaut, la censure sera différente selon la position géographique. Concernant la nudité, il pourra par exemple y avoir des différences entre les pays européens et les pays asiatiques ou du Moyen-Orient.
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Davantage d’entraide
Plus ambitieux – mais aussi plus vague, le co-fondateur de Facebook, qui définit son service comme une «infrastructure sociale», souhaite renforcer les outils pour développer la solidarité entre les membres. Il mentionne notamment l’option Safety Check, qui va désormais permettre de demander ou de proposer de l’aide. Surtout, il souhaite étendre sa portée dans le temps – par exemple dans des zones de conflit – pour ne plus se limiter à de courtes périodes de crise.
Toujours dans cet esprit, Zuckerberg espère développer le dialogue entre les citoyens et leurs dirigeants politiques tout en renforçant les communautés locales. Là aussi, il mentionne l’arrivée de nouveaux outils, sans apporter davantage de détails. Il précise cependant vouloir faciliter les échanges entre les membres qui partagent les mêmes centres d’intérêts.
Avec la publication de ce message, Facebook assume le rôle qui est le sien et qui va bien plus loin que le simple partage de photos et d’idées entre amis ou en famille. Mark Zuckerberg a mis dix ans pour capter près du quart de l’Humanité. Désormais, il semble décidé à le réorganiser.
Raphaël GRABLY
Journaliste