NOM DES FLEURS – Les amoureux enthousiastes et déçus se coiffent de la fleur de printemps. Jusqu’à devenir parfois «tulipomane»… Mais d’où vient-elle ? Le Figaro revient sur son histoire.
L’offrir rose, vous vaudra un baiser timide sur la joue, rouge, une déclaration d’amour et noire, l’expression d’un dévouement infini. Quitte à mourir pour vous le prouver… La tulipe est par sa coupe ronde et ses fines feuilles qui lui remontent jusqu’aux pétales, l’une des plus belles fleurs à offrir au printemps. Depuis cinq siècles qu’elle rayonne dans nos champs, les amoureux du monde entier n’ont eu de cesse de s’en coiffer. Preuve en est, elle était déjà celle, selon la légende, dont on se piquait en Iran et en Turquie.
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Emprunté au turc tülbent, lui-même issu du persan dulband «turban», la tulipe serait selon toute vraisemblance née d’une métonymie, ainsi que le note Nathalie Chahine dans son Petit livre du langage des fleurs, (Chêne). «C’est parce que les Turcs portaient la fleur accrochée à leur turban qu’elle prit ensuite ce nom.» Pas étonnant donc que la fleur aux pétales bien peignés se coiffa également d’un surnom ébouriffant, celui de «tulipe perroquet», pour qualifier celle dont les franges sont irrégulières. Mais ne coupons pas nos cheveux en quatre et revenons à nos tulipes…
Êtes-vous «tulipomane»?
Au XVIe siècle, la fleur, appelée lala en persan et lâle en turc, rayonne dans les riches jardins de Constantinople. Elle est le symbole de «renouveau» et de «fertilité» pour ses esthètes et cueilleurs. Sa renommée est telle qu’elle franchit les frontières de l’empire ottoman, et embarque vers les Pays-Bas, futur «pays des tulipes». Problème, les lalas rendent gagas. Carolus Clusius, préfet du Jardin Impérial d’Herbes Aromatiques de Vienne et auteur d’un ouvrage important sur les tulipes, en fera par exemple les frais. Son jardin sera régulièrement dépouillé de ses bulbes et de ses pousses.
La tulipe affole et pour cause! Elle foisonne au même moment que l’âge d’or hollandais. Au XVIIe siècle, le pays connaît en effet une rare floraison de culture et d’art. Les peintures se couvrent de pétales roses, rouges, pourpres et blanches et l’on décide de faire de la fleur l’emblème des Pays-Bas. Chaque citoyen connaît alors pour les bulbes une véritable passion. Au point de les utiliser comme monnaie d’échange et créer une bulle financière. On se souvient par exemple de la fascination de Cornélius van Baerle, personnage d’Alexandre Dumas, qui n’aspire qu’à une chose dans sa vie, créer une tulipe noire. Victime de sa popularité, la tulipe entraînera donc une crise économique en 1637. Un phénomène que l’histoire retiendra sous le nom de «tulipomanie».
Malgré cet épisode, la tulipe demeure dans les cœurs de ses citoyens. Y compris à l’étranger! La tulipe est celle que l’on offre en guise de cœur à notre amoureux. Du moins, si l’on ne se trompe pas dans la couleur… Donner une tulipe jaune, c’est encore pour certains, exprimer un amour sans retour et une tulipe blanche, c’est demander pardon…