La franco-sénégalaise, Mati Diop, lauréate du Grand Prix de la 72e édition du festival de Cannes avec son film « Atlantique », a rendu hommage à son équipe, entre la France et Dakar.
« Je crois que cela s’appelle l’aventure du cinéma. Il y a un an je terminais ce film à Dakar. Je trouve fou d’être parmi vous. D’une chose à l’autre tout s’est enclenché pour moi’’, a-t-elle déclaré samedi lors de la cérémonie de clôture du festival au Grand théâtre lumière de Cannes.
La réalisatrice a reçu son trophée des mains de l’acteur et réalisateur américain Sylvestre Stallone.
« Je suis ici et en même temps là-bas à Dakar. Ce film est aussi une déclaration à cette ville, aux rues de Dakar. J’ai hâte que vous découvriez ce film », a-t-elle ajouté.
Mati Diop se dit émue de recevoir cette récompense, une première pour le cinéma sénégalais.
La réalisatrice avait à ses côtés le coproducteur sénégalais du film Oumar Sall, directeur de Cinékap.
A travers son film « Atlantique », Mati Diop a voulu « rendre hommage à cette jeunesse d’aujourd’hui vivante, pleine de vie »
« J’ai voulu dédier ce film à une certaine jeunesse, d’abord celle disparue en mer dans l’Atlantique en voulant rejoindre l’Espagne, et j’ai voulu aussi rendre hommage à cette jeunesse d’aujourd’hui vivante, pleine de vie », a-t-elle déclaré.
La réalisatrice estime que ce film répond à « un besoin », la tragédie de « l’Atlantique », relative à la migration irrégulière, quelque chose qui l’a « profondément troublée ».
Le film de plus d’une heure, original par sa manière de parler de l’émigration, raconte l’histoire d’un groupe de garçons et de filles. Les premiers, frustrés après trois mois de travail acharné sans salaire, décident d’émigrer vers l’Espagne à travers l’atlantique.
Les filles pour leur part décident de rester au pays pour se battre et exister malgré les pesanteurs sociales. Mais elles demeuraient hantées par les souvenirs de leurs amants partis.
Entre fiction et fantastique, « Atlantique » se veut aussi une critique sociale des tares d’une société sénégalaise gangrenée par l’argent, le pouvoir, le prestige, entre autres.
Mati Diop filme « la diversité et la complexité » de ce qu’il a pu vivre et observer à Dakar. Elle fait aussi un clin d’œil à son oncle Djibril Diop Mambety, à travers une scène portant sur un troupeau de bœufs, comme dans son film « Mille Soleils ».
La réalisatrice a suivi les traces de son oncle à Cannes 27 ans après la participation de ce dernier, sélectionné dans la compétition officielle en 1992 avec son film « Hyènes ».
Mati Diop est la première réalisatrice noire à être dans la sélection officielle et à être distinguée à Cannes.
Elle s’invite ainsi à travers ce ’’Grand prix’’ dans le palmarès des cinéastes africains distingués à Cannes, après feu Idrissa Ouédraogo (Burkina Faso) en 1990 avec son film « Tilaï ».
Le réalisateur malien Souleimane Cissé a reçu le prix spécial du jury en 1987 pour son film « Yeelen » (La lumière), devenant le premier cinéaste africain à être primé sur la Croisette.
Le réalisateur tchadien Mahamat-Saleh Haroun a reçu en mai 2010 le prix du jury pour son film « Un homme qui crie ».
Le film « Chronique des années de braise » du réalisateur algérien Mohamed Lakhdar-Hamina a remporté le Palme d’or en 1975, offrant ainsi à l’Afrique son premier et seul trophée jusqu’ici.
La palme d’or de cette 72e édition du festival de Cannes est revenue au film « Parasite » du réalisateur Sud-coréen Bong Joon Ho.