En accusant les Blancs d’avoir une « culture raciste », le champion du monde, connu pour son engagement contre les discriminations, a déclenché une polémique.
Par Marc Fourny
Lilian Thuram a-t-il franchi la ligne jaune ? Le champion du monde a provoqué une sacrée polémique dans une interview accordée mercredi au Corriere dello Sport, où il s’en est pris à « la culture blanche » qui, selon lui, porte en elle un relent de « racisme », généralisant ainsi à tout un groupe une idéologie condamnable. L’ancien joueur réagissait aux cris de singe récemment lancés contre Romelu Lukaku, l’attaquant noir de l’Inter Milan, fustigeant « l’hypocrisie incroyable » des autorités en demandant plus de fermeté sur ces insultes.
À la question de savoir si la mentalité du foot était foncièrement viciée, Lilian Thuram n’y est pas allé par quatre chemins : « Il faut prendre conscience que le monde du foot n’est pas raciste, mais qu’il y a du racisme dans la culture italienne, française, européenne et, plus généralement, dans la culture blanche. » Et d’ajouter qu’il était « nécessaire d’avoir le courage de dire que les Blancs pensent être supérieurs et qu’ils croient l’être. C’est quelque chose qui dure malheureusement depuis des siècles. »
« Lourde erreur »
Des propos qui ont rapidement indigné la Licra, la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme, estimant qu’il n’était pas possible d’« essentialiser un groupe – en l’occurrence « les Blancs » – en le définissant globalement par des caractéristiques uniques qui vaudraient pour l’ensemble de ses membres ». Et de rappeler que définir des individus en fonction de la couleur de leur peau est un véritable « poison », car c’est précisément « le piège tendu par les racistes ». « La division de la société en groupes de couleur est une lourde erreur qui produira l’effet inverse au but recherché, écrit la Licra : celui d’une société fragmentée là où il y a urgence à réunir, à rassembler, à faire renaître un idéal commun. »
L’affaire a vite pris une tournure politique, plusieurs représentants de l’extrême droite se réjouissant de voir Lilian Thuram, très investi dans le combat contre le racisme, remis à sa place par l’une des plus anciennes associations militant contre les discriminations… « Il faudra revoir votre copie avant de donner des leçons antiracisme, M. Thuram », tweete ainsi Florian Philippot, président des Patriotes. De son côté, le président de SOS Racisme, Dominique Sopo, souligne que « le vrai problème n’est pas un morceau de phrase de Lilian Thuram. Le problème, c’est que des Noirs sont accueillis régulièrement par des cris de singe sur des stades de foot dans l’indifférence des autorités et trop souvent de leurs coéquipiers ».
Face à l’ampleur de la polémique, Lilian Thuram a tenu à se défendre en expliquant sur RTL que ses propos avaient fait l’objet d’un « amalgame ». Il a précisé sa pensée en expliquant que son avis ne visait pas tous les Blancs, mais les supporteurs racistes, qui ont un « complexe de supériorité » et le manifesteraient dans les stades. « Cette polémique me touche, a-t-il ajouté. Je pense que ça ferait plaisir à beaucoup de personnes de me mettre dans la catégorie raciste… »