Le Figaro | Le 25 septembre, 2018
Dans un livre blanc, la Chine accuse le président américain d’utiliser les barrières tarifaires pour «intimider» ses partenaires commerciaux. Pékin conditionne son retour à la table des négociations à l’instauration d’un dialogue basé sur le «respect mutuel».
La guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis se poursuit sur le terrain des mots. Après l’entrée en vigueur de nouvelles taxes américaines sur 200 milliards de produits chinois et la réplique chinoise sur 60 milliards de biens américains, Pékin accuse Washington d’utiliser des «méthodes de voyou» pour tenter de la faire plier. Ces propos, inscrits dans un livre blanc dont le contenu est relayé par l’agence Chine nouvelle, évoquent également un «harcèlement commercial» qui empêche la tenue d’un nouveau cycle de négociations. «Les États-Unis viennent d’adopter des restrictions commerciales très importantes. En (nous) mettant comme cela le couteau sous la gorge, comment des négociations pourraient-elles avoir lieu? Ce ne serait pas des négociations et des consultations menées dans un climat d’égalité», a déclaré le vice-ministre chinois du Commerce, Wang Shouwen, lors d’une conférence de presse à Pékin.
La Chine s’étonne d’ailleurs du revirement de l’administration américaine qui semblait, jusqu’à la semaine dernière, prête à relancer le dialogue. Des consultations avaient aussi eu lieu en août. Mais Donald Trump aurait préféré torpiller ces initiatives, affirme Pékin. «Ces consultations avaient débouché sur plusieurs consensus, et ont même fait l’objet d’une déclaration commune. Mais les États-Unis ont rejeté ces consensus, et ont pris des mesures de restrictions commerciales. Dans ce contexte, la poursuite des négociations n’est pas possible», tranche Wang Shouwen.
L’administration Trump a frappé de tarifs douaniers à 10% quelque 200 milliards de dollars d’importations annuelles de produits chinois, s’ajoutant à 50 milliards de dollars de biens déjà surtaxés.
La Chine appelle au «respect mutuel»
La Chine présente chacune de ses ripostes douanières comme une «réponse forcée à l’unilatéralisme et au protectionnisme des États-Unis» et se dit prête à les renouveler si nécessaire. Le président américain a pourtant averti qu’en cas de nouvelle réponse de Pékin, il passerait à «la phase trois» de son plan et taxerait 267 milliards de dollars d’importations chinoises supplémentaires. Des droits de douane seraient ainsi prélevés sur la totalité des importations chinoises. De quoi doucher les espoirs de revoir la Chine à la table des négociations. Dans son livre blanc, Pékin dit toujours espérer une issue positive à ces différends commerciaux dans l’intérêt des deux pays, mais prévient que le dialogue ne peut avoir lieu que dans «le respect mutuel et l’égalité».
Dans une note adressée à ses clients, le chef-économiste de la banque ING pour l’Asie, Rob Carnell, juge que si les États-Unis ne font pas un pas vers la Chine, il est peu probable que les autorités de Pékin acceptent d’ouvrir de nouvelles négociations. «Cela donnerait une image de faiblesse, aux États-Unis et en Chine», affirme-t-il. D’après l’économiste, les autorités chinoises attendent peut-être de connaître le résultat des élections de mi-mandat aux États-Unis en espérant qu’une issue favorable au camp démocrate permettra d’apaiser les relations entre les deux premières puissances économiques mondiales. Donald Trump accuse justement la Chine de vouloir influencer le scrutin en ciblant ses ripostes sur les États où se trouve son électorat rural. Les autorités chinoises réfutent ces accusations mais selon l’agence Bloomberg, le China Daily, la voix officielle de Pékin en langue anglaise, s’est offert un encart publicitaire de quatre pages dans le Des Moines Register, le plus lu des quotidiens de l’Iowa, pour expliquer aux électeurs de cet État les conséquences des frictions commerciales sur les producteurs américains de soja. Une initiative qui devrait à nouveau irriter Donald Trump…
Auteur: lefigaro.fr