Vendredi 18 janvier 2019
Edwy Plenel, co-fondateur du site d’investigation Mediapart, figure du journalisme, était mercredi soir en direct sur le plateau de Guyane La 1ère. Il participait à un débat sur le rôle de la presse aujourd’hui, en compagnie de Laurent Marot et Jessy Xavier (Guyane La 1ère), Frédéric Farine (Guyaweb) et Pierre Rossovich (France-Guyane). Morceaux choisis.
Pourquoi avoir lancé Mediapart en 2008
On a voulu défendre la valeur de notre métier et reconstruire une relation de confiance avec le public. Le journalisme, c’est produire des informations d’intérêt public. L’opinion appartient à tout le monde, mais notre travail est d’aller chercher des informations inconnues, inédites. Si on fait ça, le public est au rendez-vous. Le journaliste est un fantassin de la démocratie. Le droit de savoir est plus important que le droit de vote. Car si je vote sans savoir ce qui est d’intérêt public, je suis comme un aveugle. Je peux voter pour mon pire ennemi et mon pire malheur. Face aux rumeurs, aux mensonges et aux fake news, les journalistes ont une bataille et ne peuvent pas être spectateurs.
L’avènement des réseaux sociaux
Informer c’est un effort. Les réseaux sociaux sont la rue en version numérique. Avant, le crieur de journal était dans la rue et présentait la une aux passants. À nous de ne pas reculer sur la valeur du contenu.
Des sujets tabous dans la presse
Notre seul code de la route est l’intérêt public. Tous les pouvoirs, qu’ils soient politique ou économique, ont tendance à l’opacité. Notre rôle est de dire non.
Entre investigation et proximité
On peut faire de l’investigation et en même temps de la proximité, des reportages sociaux, des faits divers… Un journaliste qui fait des révélations d’intérêt public est un réformateur plus efficace que n’importe quel éditorialiste qui fait du bla-bla de commentaires. Par exemple, le parquet financier n’existait pas avant l’affaire Cahuzac. L’indépendance des journalistes doit être protégée, car elle est au service du public.
Les fait divers
Un fait divers peut parfois donner lieu à une affaire d’état. L’affaire Benala est au départ un fait divers. Un type qui se prend pour un policier et qui cogne des opposants politiques.
Des journalistes agressés
Il y a des violences inadmissibles de la part de manifestants qui dépassent la critique légitime des médias. La haine du journalisme est autre chose : c’est la haine de la démocratie. N’oublions pas les violences policières qui n’ont pas épargné les journalistes. D’une certaine façon, c’est plus grave que les violences des manifestants, car les forces de l’ordre représentent l’État, le droit, qu’ils abiment avec ces violences illégitimes. Il y a aussi le mauvais exemple qui vient d’en haut. Des politiques, des élus, n’ont pas le droit de discréditer l’information. Il nous faut une presse libre et indépendante. Nous sommes là pour les déranger. Nous avons des défauts, nous sommes critiquables, c’est pour cela qu’existe le pluralisme des médias. Mais n’oubliez pas que nous sommes au cœur du droit fondamental de savoir. C’est à nous de reconquérir la confiance. Notre métier est de se déplacer, pas d’être enfermé avec les puissants. De traverser tous les milieux, de rendre compte. Il n’y a pas de droits sociaux sans droit de savoir.