- Par Laurence Marchand-Taillade
- Publié le 08/03/2019
FIGAROVOX/TRIBUNE – Pour promouvoir sa «quinzaine antiraciste et solidaire», la ville de Saint Denis avait publié une affiche montrant un dessin d’Hitler avec un drapeau français. Devant le tollé, elle l’a retiré en s’excusant. Laurence Taillade y voit le symbole de l’idéologie antirépublicaine d’une certaine extrême-gauche.
Laurence Marchand-Taillade est présidente de l’Observatoire de la Laïcité du Val d’Oise. Elle est l’auteur de L’urgence laïque (éd. Michalon, 2017).
La ville de Saint Denis organise la quinzaine antiraciste et solidaire dans quelques jours. Pour promouvoir cet évènement, un visuel plus que choquant a été diffusé dans la ville. On y voit Hitler, affublé d’un drapeau français au col de la chemise.
Bien que la ville ait expliqué dans un communiqué de presse vouloir retirer cette affiche, on ne peut que s’interroger sur les ressorts qui ont mené à sa fabrication, à sa validation et sa diffusion.
Car il ne suffit pas de dire que l’on s’est trompé pour que de tels actes passent sous le radar d’une analyse de la situation qui semble alarmante. La question est la suivante: comment des élus de la République ont pu accepter une telle dégradation de l’image de la France et de son drapeau?
Si l’on regarde de plus près les choses, telles qu’elles se passent en banlieues, il s’avère que la lutte contre le racisme est devenue un fourre-tout apte à accueillir toutes les revendications identitaires et communautaristes. Les indigénistes s’en sont emparés comme arme contre la France et ses institutions, retournant contre nous nos principes et nos valeurs et jouant de notre culpabilité morbide de la période coloniale pour faire de nous des bourreaux éternels face à de tendres agneaux sans défense.
C’est philosophiquement inquiétant que Le parti majoritaire s’appuie sur un idéologue au vocabulaire aussi pauvre.
La dialectique est bien rodée, cheval de Troie d’un authentique racisme antiblancs et d’un rejet de nos valeurs universalistes, qu’il faudrait à tout prix troquer contre un relativisme bon ton. La gauche bien-pensante s’appuie sur ces anathèmes en direction de ceux qui sont encore choqués: Il est bien connu que tout «néo-républicain», terme qu’Aurélien Taché semble avoir inventé récemment, est un facho en puissance… Quand, dans les faits, ce sont ceux qui verrouillent la parole par l’anathème qui se comportent en fascistes… Mais il est aisé d’utiliser des mots sans en maîtriser les concepts. L’animateur du pôle idées de LaRem est un habitué de ces éléments de langage et amalgames. C’est philosophiquement inquiétant que Le parti majoritaire s’appuie sur un idéologue au vocabulaire aussi pauvre.
Cette rage contre le colon blanc se dirige contre l’État dont il est issu. État raciste, évidemment, dont la police est le bras armé. La haine de la police s’associe au combat antiraciste et égraine les conférences, affiches et tweets inspirés des associations, telles que Lallab qui écrit: «2 jeunes de 17 et 19 ans ont été tués par la police», désignant ainsi l’accident survenu à Grenoble, lors de la course-poursuite de deux jeunes en scooter, sans casque, et ayant refusé de se soumettre à un contrôle de police. Étrange distorsion du récit, mais pas si inhabituelle. Ce tragique accident n’aurait jamais eu lieu si ces deux adolescents avaient compris que le casque est obligatoire et qu’obtempérer aux ordres de la police n’est pas facultatif. Mais les discours de certains élus de la République, comme le conseiller municipal délégué à l’égalité des droits de Saint-Denis, sur Twitter, semblent entretenir le doute: la police ne doit pas poursuivre les gamins sur les scooters. L’impunité doit être la règle et les responsables de ce triste drame seraient les policiers. L’histoire se répète sans cesse et laisse place, inévitablement, aux mêmes inversement de valeurs: la police est responsable des comportements irrationnels de jeunes de banlieue qui rejettent toute forme d’autorité.
L’école n’est pas en reste. Elle est, elle aussi, la cible des attaques en racisme, qualifiées de discrimination structurelle, dont le fantasme suffit à justifier l’ouverture d’établissements hors contrat, où chaque communauté peut soigner sa propre paranoïa: islamophobie qui pousse vers des écoles coraniques, négrophobie, pour d’autres, les amenant imaginer la création d’écoles panafricaines! La visée idéologique séparatiste des têtes pensantes infuse et se diffuse, via des associations de parents d’élèves. Les autorités observent, se taisent, accompagnent parfois, malgré les alertes des services territoriaux.
Saint Denis est devenue, au fil des années, le laboratoire où mûrissent et d’où se répandent ces idées rétrogrades et séparatistes, où cette inversion des valeurs est omniprésente.
Cette démagogie s’incarne autant sous les traits du clientélisme que ceux d’un dogmatisme ancré à la gauche de la gauche. Saint Denis est devenue, au fil des années, le laboratoire où murissent et d’où se répandent ces idées rétrogrades et séparatistes, où cette inversion des valeurs est omniprésente.
La Bourse du travail est l’un des lieux clés où se tiennent les colloques de l’élite décolonialiste, anti-raciste, intersectionnaliste. On peut y croiser quelques têtes célèbres, parmi lesquelles Clémentine Autain.
Cette bien-pensance gagne toutes les strates politiques. Le manque de courage et l’ambition sont les deux ingrédients de la recette du poison qui tue à petit feu la Nation. Ainsi, lors du débat sur l’apposition du drapeau dans toutes les salles de classe, la majorité LaRem s’est déchirée. Les opposants farouches à cette mesure allant jusqu’à employer des termes très durs, voir injurieux, contre le drapeau. Ainsi, le très célèbre monsieur au serre-tête emprunte à Jean Zay une phrase que lui-même a très vite reniée, pour justifier son refus de voir cet emblème national se dresser devant tous les pupitres d’écoliers: «quinze cent mille hommes morts pour cette saloperie tricolore», ignorant qu’il est que c’est ce même texte qui fut utilisé par Vichy pour faire arrêter et condamner l’un de nos plus républicains et brillants Hommes politiques, rapporte François Cormier-Bouligeon, député du Cher.
Cette haine de nos symboles, ces critiques incessantes, de la part de nos universitaires, politiques, responsables associatifs, mène à une fracture profonde du peuple et confine les minorités dans le syndrome de la victime par essence. Ça ne peut, ça ne doit pas durer. Elle est le corollaire de la montée des nationalismes, qui ont su récupérer à leur profit, et en les détournant, tous les attributs de la République.
Parce que je crois en l’amélioration de l’Homme et de la société, je crois en cet idéal républicain que nous avons fait Nôtre et qui garantit à chaque citoyen des droits inaliénables. Ne revenons pas sur ce qui nous est le plus cher, n’abandonnons pas nos symboles, sous le fallacieux prétexte que la poussée est violente et que nous devons nous adapter aux évolutions de la société.
Cet abandon de nos symboles, de nos principes, de nos valeurs est le symptôme grave d’une société qui perd ses repères, qui s’oublie, et se délaie inexorablement dans un tout qui n’aura bientôt plus de saveur.
L’urgence est au sursaut républicain, aucune dérive ne peut plus être tolérée, notamment quand elle touche à l’image du pays. Nous sommes en droit d’attendre de l’État des mesures symboliques fortes en direction de ces associations, élus, institutions qui jouent avec le feu. Ils doivent être mis en demeure d’exemplarité.
Cet abandon de nos symboles, de nos principes, de nos valeurs est le symptôme grave d’une société qui perd ses repères, qui s’oublie, et se délaie inexorablement dans un tout qui n’aura bientôt plus de saveur. Cette exception, ce rayonnement français, nous devons, au contraire, le porter, fièrement, et l’exporter au secours de ceux qui ne bénéficient ni de notre liberté de parole, ni de la liberté de conscience. C’est notre devoir le plus impérieux. Il est temps que chacun prenne ses responsabilités face à un défi qui est celui du siècle à venir.